Comment aider mon enfant en orthographe ?
Mon fils de 10 ans travaille plutôt bien, mais question orthographe, c’est aussi catastrophique que sa mère ! Je retrouve les mêmes dictées bourrées de fautes et barrées de rouge que les miennes quand j’étais petite !
Dans la pédagogie Freinet, on incite les élèves à distinguer les similitudes ou les différences entre des mots pour bien en repérer l’orthographe. On joue aussi à « collectionner » des mots : d’un même thème (le foot, les animaux, la forêt…), d’une même famille ou ayant une particularité orthographique commune (les mots qui finissent en « -tion » comme récréation et construction, par exemple). Cette chasse aux mots donne à l’orthographe une autre dimension : on joue au détective et quand la récolte de mots est fructueuse, en général on est contents. « Je donne des ciseaux et un journal à mon enfant et il part à la chasse aux mots avec deux “p” ou deux “s”. Il les découpe et les colle dans son carnet de collectionneur » raconte une maman... « C’est fou comme le simple fait de le mettre dans une autre situation que le recopiage des mots qu’on lui demande à l’école, cela l’aide à mieux orthographier les mots. »
Sur le principe du matériel Montessori bicolore rouge et bleu, on peut réaliser à peu de frais de petites fiches cartonnées avec des mots découpés en deux parties. Par exemple, pour le mot « imprudent ». Le radical du mot, « prudent », est écrit en rouge : c’est la partie du mot qui ne change pas. Les suffixes ou préfixes, « im » pour notre exemple, sont écrits en bleu : c’est la partie du mot qui change. Le jeu consiste ensuite à s’amuser, comme au mémo, à réunir le plus de paires de mots complets et bien orthographiés. L’autocorrection se fait d’elle-même grâce au code couleur bleu et rouge. Ce genre d’activités demande bien sûr pas mal d’implication de la part des parents, mais c’est pour la bonne cause ! Ceux qui ont déjà utilisé ce matériel à la maison en connaissent l’efficacité.
« Le jeu n’est-il pas la meilleure façon de graver les mots pour toujours ? » s’amuse un papa. C’est en voyant son fils lister par écrit toutes ses cartes Pokémon sans aucune faute que l’idée lui est venue de s’en servir pour préparer les mots de la dictée. Les Pokémon « éclair lunaire », « flamme éternelle », « poing musclé », etc. étaient dans toutes les phrases qu’il lui a fait écrire pour préparer ses dictées ! Quand le plaisir est là, apprendre ces listes de mots est un peu moins une corvée. Et quand la phrase amusante de la dictée de son papa ressurgira dans sa tête lors d’une dictée en classe, il évitera les fautes.
Mon enfant est excellent dans les exercices systématiques, il connaît parfaitement les règles de grammaire mais dès qu’il rédige un texte, c’est l’horreur. Il y a quelque chose qui m’échappe !
Apprendre à retrouver des mots ou un accord de verbe dans sa tête est difficile, d’où l’importance d’aider ses enfants en leur montrant comment pratiquer la gestion mentale à la maison. Une chose est sûre, c’est que cette méthode aide à faire de rapides progrès en orthographe. Certains enfants vont voir apparaître dans leur tête le mot comme ils l’ont écrit dans leur cahier, avec sa difficulté ou sa particularité qui clignote en rouge (un « e » muet, un accent sur le « où »). D’autres entendent leur voix ou celle de la personne qui leur a lu le mot l’épeler lettre après lettre dans leur tête… Se représenter ainsi mentalement les mots, même par un dessin, cela rassure beaucoup. « Mon enfant est si inquiet de mal écrire qu’il est capable de faire n’importe quoi, comme quand il avait parfaitement bien écrit le mot ‘’beaucoup” dans sa dictée et qu’il y a ajouté un “s” à la fin, en relisant ! » C’est en effet souvent le stress qui fait faire ces fautes de dernière minute.
Les textes préférés des enfants sont les histoires drôles et les blagues… Ce sont d’excellents manuels de français, car il faut avoir une bonne oreille pour comprendre la subtilité d’une blague et s’approprier les mots pour pouvoir la répéter. « Je fais des dictées “schtroumpfantes” pour ma fille de 8 ans, en prenant exemple sur son maître à l’école. Je lui demande à chaque fois qui va “schtroumpfer” une super dictée sans faire plein de “schtroumpfs”… », raconte un papa. Mettre de l’humour dans la préparation des dictées, se raconter des histoires drôles pour comprendre le fonctionnement de la langue française, en inventer d’autres, n’est ce pas ce qui aide le mieux à comprendre à quoi sert l’orthographe ?
Je suis nulle en orthographe et je pensais déléguer cela à mon mari, mais comme il s’agace et accable mon fils avec des “tu n’as qu’à lire plus, tu n’as qu’à réfléchir, tu n’as qu’à faire plus attention aux mots”… ça me contrarie ! J’aimerais pouvoir l’aider autrement.
Les enfants sont toujours plus attentifs lorsqu’on donne du sens à ce qu’ils apprennent. Plutôt que de leur faire répéter et apprendre une liste de mots par cœur, juste pour avoir une bonne note à la prochaine dictée, mieux vaut les laisser se les approprier ! Cette méthode* s’est avérée très efficace au siècle dernier avec des enfants très peu motivés par l’école. L’idée forte étant que si les mots contiennent une charge affective ou sont en lien avec la vie quotidienne, les enfants les retiendront facilement. « Je demande à mon fils, qui est en CM2, d’inclure les mots à apprendre dans un petit texte qui raconte ce qu’il a aimé dans la journée, menu de cantine compris ! Je dois ensuite deviner où se cachent ces “mots mystères”. Cela permet à la fois de réviser les mots et de rédiger un texte personnel, souvent très réussi… même si quelques fautes persistent, ce qui est bien normal. »
* imaginée par les enseignants-pédagogues Paulo Freire et Sylvia Ashton Warner
Lire des livres est important pour améliorer l’orthographe, mais pas seulement. C’est aussi souvent en communiquant par l’écrit que l’orthographe se met à en place. « On s’écrit des messages et des petits mots doux avec ma fille de 10 ans, en mettant un point d’honneur à ne pas faire de fautes, ce qui est souvent mon cas... Ma fille est devenue ma super-vérificatrice : elle me corrige mais sans se moquer de moi, ce que j’apprécie ! » Le réflexe d’autocorrection, à la base de la pédagogie Freinet, donne aux enfants un vrai pouvoir de s’améliorer en orthographe, en toute autonomie. À l’école, le « toilettage » des textes se fait le plus souvent en deux étapes. Tout d’abord, on écrit un texte librement rédigé par un enfant au tableau et on le lit en silence. Puis chacun va participer à l’amélioration du texte, tout en justifiant sa demande de modification (ponctuation, mauvaise orthographe d’un mot, ou son remplacement par un autre…). La « toilette » des textes, voilà aussi un bien joli terme à faire sien pour éviter d’employer à la maison le verbe « corriger » !
Les bons accords, les règles de conjugaison ou de ponctuation, il y en beaucoup… trop, de l’avis de nous, parents. « Pourquoi, quand il y a une liste de mots à apprendre et que je lui explique où se trouve la difficulté orthographique, mon enfant, qui est au CP, l’écrit une fois juste, une fois en oubliant une lettre, une autre fois avec une lettre en trop… ? » se demande un parent perplexe. Avant de penser dyslexie, on peut d’abord proposer à son enfant de s’auto-interroger. « Ça m’intéresse de voir pourquoi j’ai fait cette faute… », se dira-t-il en se parlant à lui-même. Ses propres réponses vont pouvoir l’éclairer : « J’ai fait une erreur car je pensais que l’arbre était un nom féminin alors qu’on dit “un” arbre, donc je me corrige. Pareil pour les légumes que je ne dois pas écrire “les gumes” en deux mots car on dit “un” légume… » Relire et analyser, c’est une bonne habitude à donner à son enfant. C’est un peu laborieux au début mais il y gagnera ensuite en rapidité et en confiance en lui.